Jean-Jacques Rousseau et son image sculptée, 1778-1798
Domaine de Vizille Musée de la Révolution française
Comme celles de Voltaire dont elles sont inséparables, les représentations sculptées de Rousseau sont entrées très tôt dans les collections du musée de la Révolution française. Toutefois, dès 1928, peu après que le château de Vizille devienne une résidence présidentielle, des moulages en plâtre patiné des bustes de Rousseau à l'antique et de Voltaire au naturel d'après Houdon sont envoyés par la Réunion des musées nationaux avec d'autres philosophes et orateurs des Lumières et de la Révolution.
En 1987, les hasards du marché de l'art permettent l'acquisition d'un cabinet de cire exceptionnel dans lequel figure Rousseau flanqué d'Émile, associé à Voltaire et Franklin. Ce dispositif complexe, oeuvre du sculpteur piémontais Francesco Orso ou Orsy entre 1790 et 1791, probablement exposé à l'époque dans les galeries du Palais- Royal, représente les trois hommes, dont la réunion est qualifiée par une estampe contemporaine de « flambeau de l'univers », conversant après leur mort aux Champs-Élysées. À l'arrière-plan, les conifères et les montagnes évoquent les Alpes que Rousseau avaient célébrées comme le berceau de la liberté. Si le musée a pu se procurer la même année le Voltaire écrasant l'infâme, statuette en plâtre de Claude-André Deseine, il manque encore son inévitable pendant, Rousseau, donts eulement deux exemplaires ont été repérés - l'un d'eux se trouvant au musée Jacquemart-André à Chaalis. C'est finalement le don généreux et remarquable en 1992 de Jean Lorta descendant homonyme du sculpteur Jean-François Lorta qui est à l'origine de cette publication. Son projet en terre cuite de monument à Rousseau suscité par le concours de l'An II, rejoint par un autre anonyme fort différent datant des années 1790-1791 déposé par le musée du Louvre en 2005, invitent dans le cadre du tricentenaire de la naissance du philosophe à revenir de manière spécifique sur l'image sculptées de Rousseau à la fin du XVIIIe siècle, corpus évoqué des 1912 par Paul Vitry et considérablement enrichi et documenté en 1989 par Gisela Gramaccini.
Il revenait à Guilhem Scherf, conservateur en chef au département des Sculptures du Louvre, de mettre en perspective cette abondante production et à Séverine Darroussat, historienne d'art, de refaire le point sur les projets révolutionnaires d'un monument à Rousseau décrété le 29 décembre 1791 par l'Assemblée nationale « pénétrée de ce que la Nation française doit à la mémoire de J.-J. Rousseau ».