Les écivains en Isère
Alternative textuelle à la carte des écrivains en Isère
Découvrez le patrimoine isérois à travers le regard des écrivains qui ont vécu, séjourné et écrit sur l'Isère. Une belle occasion de parcourir le territoire grâce à leurs textes. Ils racontent la beauté des paysages, la vie et le quotidien des habitants, et partagent des souvenirs d'enfance ...
Paul Claudel, Frédéric Dard, Alphonse de Lamartine, Jean Giono, Alphonse Daudet ou encore Georges Perec, isérois d'origine ou d'adoption ont écrit des textes emblématiques avec pour toile de fond notre département. Villages, châteaux, paysages y sont évoqués avec émotion, découvrez-les à travers cette sélection.
Cette liste constitue un panorama des auteurs les plus connus et n'a pas la prétention d'être une recherche exhaustive.
ALLEVARD
Alphonse DAUDET (13 mai 1840, Nîmes - 16 décembre 1897, Paris)
Il a découvert Allevard avec son épouse et ses fils en 1879 à l’occasion d’une cure thermale. Ce séjour lui inspira le roman Numa Roumestan, dont le personnage principal se rend en cure à "Arvillard" (mais c’est bien Allevard que décrit l’auteur) et arpente le pays en visiteur curieux.
"Cette source précieuse est à dix minutes du pays, en montant du côté des hauts-fourneaux, dans une gorge où roule et gronde un torrent, tout mousseux d’écume, descendu du glacier qui ferme la perspective, luisant et clair entre les Alpes bleues, et qui semble, dans cette blancheur des eaux battues, fondre et délayer sans cesse sa base invisible et neigeuse."
Il décrit également les descentes en traineau, au départ de Bramefarine : "On descendait "à la ramasse" dans des traîneaux de feuillages, sans dossier, où il faut se cramponner aux branches, lancé à corps perdu sur les pentes, tiré par un montagnard qui va droit devant lui sur le velours des pâturages, le lit caillouteux des torrents secs...vous laissant en bas à la fin, ébloui, moulu, suffoqué, tout le corps en branle et les yeux tourbillonnants avec la sensation de survivre au plus horrible tremblement de terre ...." Extrait de "Numa Roumesta", Alphonse Daudet, 1881
La Galerie - musée d’Allevard présente une collection de photographie, objets et documents qui relatent cette époque.
BRANGUES
Paul CLAUDEL (6 août1868, Villeneuve-sur-Fère – 23 février 1955, Paris)
Dramaturge, poète, essayiste et diplomate français, membre de l'Académie française, Paul Claudel acquiert le château de Brangues en 1927 et s’y installe définitivement en 1936.
"Le Dauphiné n'est pas ma terre natale, mais il est ma patrie d'élection. Le Rhône en vain désormais essayerait de m'arracher à ses montagnes ; je leur suis rattaché par trop d'affluents et la force de leur cours ne fait qu'affirmer pour moi celle de mes nouvelles racines."
Extrait d’«Éloges du Dauphiné », Éd. des Cahiers de l’Alpe, 1965.
L’espace d’exposition Claudel-Stendhal à Brangues permet au public de mieux connaître la vie et l’œuvre de ces deux écrivains. Des expositions temporaires y sont présentées chaque année.
Ce lieu appartient à la Fédération nationale des maisons d’écrivains et des patrimoines littéraires.
Images : Château de Brangues ; portrait de Paul Claudel ; vue extérieure de l’espace d’exposition Claudel-Stendhal à Brangues. Consultez le site internet.
CHABONS ET LE GRAND-LEMPS
Alphonse DE LAMARTINE (21 octobre 1790, Mâcon – 28 février 1869, Paris)
Poète, dramaturge, romancier, il est l’une des figures du Romantisme. En pension au collège de Belley (Ain), il se lie d'amitié avec Aymon de Virieu. Ce dernier vivait en famille dans le château de Lemps dans lequel il a plusieurs fois reçu Lamartine. Au cours de ces séjours, le poète s’est rendu régulièrement sur la propriété de son ami au Château de Pupetières à Chabons, alors encore en ruine (Le château ne sera restauré qu’à partir de 1861).
C’est à l'occasion de l’une de ses visites, en juillet 1819, que le poète écrit "Le vallon" publié dans "Les méditations poétiques", recueil qui lui apporta la gloire.
"Le Vallon"
"Mon cœur, lassé de tout, même de l’espérance,
N’ira plus de ses vœux importuner le sort ;
Prêtez-moi seulement, vallon de mon enfance,
Un asile d’un jour pour attendre la mort.
Voici l’étroit sentier de l’obscure vallée :
Du flanc de ses coteaux pendent des bois épais,
Qui, courbant sur mon front leur ombre entremêlée,
Me couvrent tout entier de silence et de paix.
Là, deux ruisseaux cachés sous des ponts de verdure
Tracent en serpentant les contours du vallon : Ils mêlent un moment leur onde et leur murmure,
Et non loin de leur source ils se perdent sans nom.
J’ai trop vu, trop senti, trop aimé dans ma vie ;
Je viens chercher vivant le calme du Léthé.
Beaux lieux, soyez pour moi ces bords où l’on oublie ;
L’oubli seul désormais est ma félicité."
CHICHILIANNE Mont Aiguille
François RABELAIS (Seuilly, 1483 ou 1494 - Paris le 9 avril 1553)
Écrivain français humaniste de la Renaissance. Ecclésiastique, libre penseur et médecin, il incarne l’image du bon vivant liée à son œuvre littéraire. Rabelais est un admirateur d'Érasme, maniant la parodie et la satire, il lutte en faveur de la tolérance et de la paix. Il signe des œuvres majeures comme Pantagruel en 1532 et Gargantua en 1534.
Fuyant le royaume de France, pour cause de scandale, en 1535 il réside à Grenoble durant cinq mois, rue des Clerc chez son ami François Vachon, alors Président du parlement du Dauphiné.
En 1548, dans le Quart Livre, il relate l'ascension faite par Antoine de Ville du "mont Inaccessible" de façon quelque peu imaginaire, tant par la forme de la montagne que par le nom de l'alpiniste ou ce qu'il trouva au sommet : "Ainsi dict pource qu'il est en forme d'un potiron, et de toute memoire persone surmonter ne l'a peu, fors Doyac, lequel avecques engins mirificques y monta et au-dessus trouva un vieux bélier. C'estoit à diviner qui là transporté l'avait. Aucuns le dirent, estant jeune aignelet, par quelque aigle ou duc chaüant là ravy, s'estre entre les buissons saulvé."
LA CÔTE-SAINT-ANDRÉ
Hector BERLIOZ (11 décembre 1803, La Côte-Saint-André - 8 mars 1869, Paris)
Compositeur, chef d'orchestre, critique musical et écrivain, il est l’une des plus grandes figures de la musique romantique européenne. Hector Berlioz reçoit de son père une éducation marquée par les idées d’un médecin éclairé du 18e siècle. Dans l’appartement natal de la Côte-Saint-André, il découvre la musique et compose très jeune ses premières romances.
"La Côte-Saint-André, son nom l’indique, est bâtie sur le versant d’une colline, et domine une assez vaste plaine, riche, dorée, verdoyante, dont le silence a je ne sais quelle majesté rêveuse, encore augmentée par la ceinture de montagnes qui la borne au sud et à l’est, et derrière laquelle se dressent au loin, chargés de glaciers, les pics gigantesques des Alpes."
Hector Berlioz, Extrait de Mémoires, Hector Berlioz, 1870.
Le Musée Hector Berlioz, appartenant au réseau des 11 musées départementaux, est installé dans l’appartement natal du compositeur. Mobilier d’époque, partitions originales, correspondances, instruments de musique, tableaux et gravures agrémentent les pièces de la maison qui ont conservé leur décor d’origine. Consultez le site internet du musée
Le festival Berlioz, organisé chaque été dans sa ville natale depuis 1994, est aujourd’hui l’un des rares festivals de musique symphonique en France. Ce lieu appartient à la Fédération nationale des maisons d’écrivains et des patrimoines littéraires.
GRENOBLE
Jean-Pierre Andrevon (né le 19 septembre 1937, Bourgoin-Jallieu)
Après une enfance à la campagne marquée par la guerre et l'occupation, il effectue des études secondaires au lycée Champollion à Grenoble.
Journaliste, peintre, auteur-compositeur-interprète, cinéaste et écrivain. De sensibilité écologiste, il est considéré comme un auteur engagé. Dans les années 1970 il écrit et dessine pour Charlie Hebdo. Il est l’auteur de nombreux ouvrages de Science-fiction, thriller, ou policier.
En 1993, il publie "Je me souviens de Grenoble "
"Autrefois, la place Victor-Hugo se couvrait en automne de marrons tombés des marronniers […] Qu’est devenu la belle façade art déco du Théâtre municipal ? Et celle des Nouvelles Galeries ? On se promène dans Grenoble, et, sans qu’on y prenne garde, tout change. Où sont les lavandières de l’Isère ? et le tramway ? Ah ! c’est vrai, lui a été remplacé par un autre tramway comme la cabine unique du téléphérique de la Bastille l’a été par les bulles."
Henri BEYLE STENDHAL (23 janvier 1783, Grenoble - 23 mars 1842, Paris)
"Pour trouver des sites charmants, délicieux et dignes des plus beaux paysages de la Lombardie, il fallait suivre la route au-dessus du vallon de Vaunavey et passer par Brié. C’est ce que j’ai fait aujourd’hui pour revenir à Grenoble. Cette route plaquée contre la base du grand pic de Taillefer, et qui suit les gorges formées par les montagnes qui lui servent de contre-forts, est une des plus agréables que j’ai vues en ma vie. »
Stendhal, Extrait de Mémoires d’un touriste, tome I, 1838.
Stendhal a eu des mots très durs pour la bourgeoisie grenobloise ; mais il a aussi écrit des pages admirables sur le Dauphiné, sa population comme ses paysages, notamment dans Mémoires d’un touriste et La Vie de Henry Brulard.
L’appartement natal de Stendhal situé rue Jean-Jacques Rousseau est ouvert à la visite.
Comme l’écrivain le décrit dans "La vie de Henry Brulard", ce lieu a été synonyme de bonheur jusqu'au décès de sa mère Henriette. Il devient ensuite pour le jeune Henri celui du chagrin et de l’éducation austère que lui impose son père par l’entremise d’un précepteur particulièrement conservateur : l'abbé Raillanne. C'est dans le salon de compagnie qui donnait sur la rue des Vieux Jésuites qu'à 12 ou 13 ans il écrit Selmours, son premier essai littéraire. Ce lieu appartient à la Fédération nationale des maisons d’écrivains et des patrimoines littéraires
Consultez le site internet du Musée Stendhal.
Pierre CHODERLOS DE LACLOS (18 octobre 1741, Amiens – 5 septembre 1803, Tarente)
C’est en garnison à Grenoble (de 1769 à 1774) que cet officier d’artillerie, qui s’essaie aussi à l’écriture, rédige « Les liaisons dangereuses ». Ce roman épistolaire et libertin, chef d’œuvre de la littérature française, met en scène des personnages directement inspirés de la haute société grenobloise.
"L'homme jouit du bonheur qu'il ressent, et la femme de celui qu'elle procure. Le plaisir de l'un est de satisfaire des désirs, celui de l'autre est surtout de les faire naître."
"Ou vous avez un rival, ou vous n’en avez pas. Si vous en avez un, il faut plaire pour lui être préféré ; si vous n’en avez pas, il faut plaire encore pour éviter d’en avoir. "
Jules VERNE (8 février 1828, Nantes – 24 mars 1905, Amiens)
Écrivain français dont l'œuvre est majoritairement constituée de romans d'aventures évoquant les progrès scientifiques du 19e siècle.
Jules Verne commence par écrire des pièces de théâtre mais ne connait le succès qu'en 1863 lorsqu’il signe son premier roman, « Cinq Semaines en ballon ». Celui-ci connaît un très grand succès, y compris à l'étranger. À partir des « Aventures du capitaine Hatteras », ses romans entreront dans le cadre des Voyages extraordinaires, qui comptent 62 romans et 18 nouvelles.
Davantage apprécié pour ses romans d’aventures, Jules Verne a également écrit des ouvrages encyclopédiques comme « La Géographie illustrée de la France et de ses colonies » en 1867 et 1868. Chaque département y est décrit précisément (situation, climat superficie…). Ces descriptions, qui se veulent scientifiques, laissent transparaître la plume de l’écrivain.
"Le caractère dauphinois est empreint d’une grande fierté et d’un vif amour de l’indépendance ; c’est le pays des vertus montagnardes, la franchise, l’hospitalité, la hardiesse, le respect de soi-même et des autres ; l’habitant des villes, comme celui des campagnes a son franc-parler ; il critique hautement ce qui lui paraît critiquable, il n’a aucune servilité dans l’esprit ; il est fort, il est calme et par-dessus toutes choses il aime la liberté […]" "Grenoble, ville habitée par une population intelligente et artiste, a des académies, des sociétés de statistique, d’agriculture, de zoologie, d’acclimatation, etc. Sa bibliothèque, qui contient quatre-vingt-mille volumes, est l’une des plus riche de France par ses trésors théologiques ; là, au milieu de ses compatriotes célèbres se voit le buste de Barnave par Houdon. Le musée de peinture a des tableaux des écoles italienne, allemande, flamande, hollandaise, dus au pinceau des plus grand peintres. […]"
LALLEY
Jean GIONO (30 mars 1895, Manosque - 9 octobre 1970, Manosque)
Écrivain français, ami du peintre Edith Berger, il a fait de nombreux séjours à Tréminis et à Lalley entre 1931 et 1948. Accompagnés d’André Gide, ils se retrouvèrent notamment dans les années 1935-36 dans la maison Bernard à Lalley (aujourd’hui labellisée Patrimoine en Isère par le Département).
Le Trièves lui fournit le cadre et l’inspiration de plusieurs de ses romans dont "Un Roi sans divertissement", "Bataille dans la montagne", "Faust au Village"…
"Cette haute plaine du Trièves cahotante, effondrée, retroussée en houle de terre (…) c’est le cloître, c’est la chartreuse où je viens chercher la paix. Elle ne m’a jamais demandé d’effort préalables : elle m’a toujours accueilli avec mon entier appareil passionnel (…) Elle m’a toujours pris raboteux et plein de nœuds et de colères et elle m’a toujours laissé glisser de nouveau dans le monde lisse et vif comme une navette de tisserands. J’arrive, mes montagnes ! Fermez la porte derrière moi !"
"Possession des richesses, Rondeur des jours", 1943
Un espace d’exposition ouvert à la visite est dédié à Jean Giono à Lalley. Consultez le site internet de l'Espace Giono.
LA MURE
Joris-Karl HUYSMANS (5 février 1848, Paris - 12 mai 1907, Paris)
Romancier et critique d’art, il prit une part active à la vie littéraire et artistique française dans le dernier quart du 19e siècle et jusqu’à sa mort.
Dans la dernière partie de sa vie, il se convertit au catholicisme, et renoue avec la tradition de la littérature mystique. Il fut un ami proche de l'abbé Mugnier.
"La Cathédrale" est un roman publié en 1898. C'est, après En route (1895) et avant L'Oblat (1903), le deuxième volume de la Trilogie de la conversion, qui raconte la conversion de Durtal, personnage apparu dans Là-bas (1891). C’est au cours de cette période que l’auteur effectue des séjours dans différents monastères français. Il se rend à la Grande Chartreuse et à Notre-Dame-de-La-Salette.
Dans cet ouvrage il décrit avec force les paysages de l’Isère qu’il traverse et notamment son périple en train de Saint-Georges-de-Commiers à La Mure…
"Quel paysage ! ruminait Durtal, évoquant le souvenir d’un voyage qu’il avait fait depuis son retour de La Trappe avec l’Abbé Gévresin et sa gouvernante. Il se rappelait l’effroi du site qu’il avait traversé entre Saint-Georges-de-Commiers et La Mure [...]
Le train montait en soufflant, tournant sur lui-même tel qu’une toupie, descendait dans des tunnels, s’engouffrait sous la terre, paraissait refouler devant lui le jour, puis il sortait dans un hallali de lumière, revenait sur ses pas, se dérobait dans un nouveau trou, puis ressortait encore dans un bruit strident de sifflets et un fracas assourdissant de roues, et courait sur des lacets taillés en pleine roche, sur le flan des monts. […]
Penché à la portière du wagon, Durtal plongeait directement dans l'abîme ; sur cette ligne étroite à une seule voie, le train longeait, d'un côté, les quartiers accumulés de pierre et, de l'autre, le vide. Seigneur ! si l'on déraillait ! Quelle capilotade ! se disait-il [...]
On filait suspendus en l’air à des vitesses vertigineuses, sur d’interminables balcons, sans balustrades ; et au-dessous les falaises dévalaient en avalanches, tombaient abruptes, nues, sans une végétation, sans un arbre ; par endroits, elles paraissaient fendues à coups de hache dans d’immenses amas de bois pétrifiés ; par d’autres, coupés dans des blocs exfoliés d’ardoises. Et tout autour, un cirque s’ouvrait de montagnes sans fin, couvrant le ciel, se superposant, les unes sur les autres, barrant le passage des nuées, arrêtant la marche en avant du ciel."
PÉTICHET, SAINT-THÉOFFREY
Olivier MESSIAEN (10 décembre 1908, Avignon - 27 avril 1992, Clichy)
Passionné d’orgue et d’oiseaux, Olivier Messiaen (1908, Avignon - 1992, Clichy) est l’un des musiciens du XXe siècle les plus célébrés à travers le monde. Après avoir passé une partie de son enfance à Grenoble, il est revenu dans la région en 1936, où il a installé sa résidence estivale à Petichet, face au lac de Laffrey.
"J’ai vu ici des paysages de montagnes absolument sublimes. Le Dauphiné est vraiment ce qu’il y a de plus grand en France".
Olivier Messiaen, Extrait d’une lettre écrite par Olivier Messiaen à sa femme Claire Delbos en 1935.
La Maison Messiaen est une résidence d’artistes créée dans les lieux (rénovés et adaptés) où le compositeur a vécu. Aujourd’hui, artistes, musiciens, poètes, plasticiens ou ornithologues viennent travailler et créer dans le même esprit visionnaire d’union entre la nature et les arts qu’Olivier Messiaen et créer un écho à son œuvre.
SAINT-CHEF
Frédéric DARD (29 juin 1921, Bourgoin-Jallieu - 6 juin 2000, Bonnefontaine (Suisse)
Écrivain français principalement connu pour les aventures du commissaire San-Antonio. Il a passé une partie de son enfance à Saint-Chef et y est régulièrement venu se ressourcer.
"Saint-Chef…village heureux…Comment ne pas qualifier ainsi le pays où l’on a eu douze ans… ? Car j’ai eu douze ans à Saint-Chef. J’ai fait ma première communion dans cette abbaye que j’admirais déjà sans la comprendre et où je me livrais à maintes facéties d’un goût douteux.(…)
Oui, village heureux où j’ai, pour la première fois éprouvé les vapeurs du vin et senti résonner en moi le rire des filles…"
Extrait du programme de la fête d’été, Saint-Chef, août 1947
"Ça sent bon l’humus, l’herbe fraîche, le chèvrefeuille. Je marche dans l’herbe trempée de rosée sans me soucier de mes pompes ni du bas de mon grimpant. Ça me rappelle des instants de jadis, dans notre Dauphiné d’origine. Les digitales, les lupins et ces espèces d’épis verts, crochus, qu’on se posait sur l’intérieur du poignet et qui remontait lentement ton avant-bras, « entraînés par le sang », assurait mémé ».
Extrait de « Les eunuques ne sont jamais chauves", 1995
"Avant de me sacquer, on m’a saucissonné. Les bras le long du corps. J’ankylose ! (…)
Antoine, mon biquet, va falloir t’en sortir. » Cette détermination m’agrée. Du bout des doigts je caresse mon futal. Ma poche droite. Je sens un truc dur qui n’est pas mon sesque (comme dit Béru). Réfléchis. Identifie. Mon Opinel, le compagnon fidèle de tous les sujets d’ancien Dauphin de France. Le couteau le plus simple et le plus résistant qu’on ait jamais inventé depuis l’âge de la pierre taillée ».
Extrait de « Grimpe-la en danseuse", 1997
Découvrez le musée de Saint chef qui retrace près de 15 siècles d’histoire à Saint-Chef : les origines de l’abbaye, l’interprétation des fresques romanes de l’église et les traditions locales. Il consacre une partie de son exposition à Frédéric Dard.
SAINT-CHRISTOPHE-EN-OISANS
Roger CANAC (7 juin 1928, Auriac-Lagast - 3 octobre 2020, Bourg-d'Oisans)
Roger Canac a d’abord été pâtre avant de fréquenter le séminaire puis les grands philosophes.
Puis il enseigne l’agriculture au sein d'une communauté en Haute-Savoie. Il devient guide de haute montagne et s'établit dans le massif de l'Oisans en tant qu'instituteur, avant de fonder une école de formation aux métiers de la montagne. Il devient aussi président de la Compagnie des guides de l'Oisans en 1975, et, dans les années 1980, président du Syndicat national des guides de montagne. Écrivain engagé, il est reconnu pour son humanisme et sa passion pour la montagne. Il est l'auteur de plusieurs livres : La Montagne, Gaspard de la Meije, L'Or des cristalliers...
"En 1960 j’étais maître d’école au village de Mizoën. Du promontoire de l’église, on voyait, côté levant, le Grand Pic de la Meije, le lac du Chambon sous lequel trois villages avaient cessé de vivre ; et côté couchant, les gorges et les terrasses glaciaires de l’Infernet, le Taillefer et ses somptueux couchers de soleil."
Roger Canac : "Histoire buissonnière des Protestants de Mizoën et du Haut-Oisans" 1999
"Et je me mêle d’écrire sur Gaspard. Comme beaucoup. Sinistre crétin ou imbécile heureux, j’ai escaladé les mêmes montagnes que lui, sans penser à l’empreinte de ses pas. "Le sens ne vient pas avant l’âge", dit un vieux proverbe. Fort heureusement, je me suis ravisé. Et aujourd’hui je salue, dans le vallon de la Selle le "chazal" où la famille Gaspard tenait montagne – il faudrait le relever comme un monument – c’est là que le Père Gaspard offrait à ses premiers voyageurs de grands bols de lait de montagne dont on n’a pas idée aux plats pays. Je me mets à éprouver du bonheur à retrouver le souvenir de son passage sur les nombreux sommets qu’il parcourut, à boire aux mêmes sources, à me guider aux mêmes repères et à m’abriter aux mêmes repaires. Et alors j’ai pensé récrire pour cultiver, si c’est encore possible, un patrimoine qui ne se touche ni ne se voit : un patrimoine de l’esprit".
Roger Canac "Gaspard de la Meije", 1977
A Saint-Christophe en Oisans, ne manquez pas la visite du musée "Mémoires d'alpinisme" qui retrace l'histoire de l'alpinisme dans le massif des écrins. Consultez le site internet du musée.
A deux pas se trouve l'émouvant cimetière où sont enterrés les célèbres guides montagnards de la Bérarde. Ce site est labéllisé "Patrimoine en Isère".
A Bourg d'Oisans, le musée Galta présente une exceptionnelle collection de minéraux alpins. Consultez le site internet du musée.
SAINT-MARCELLIN
BARBARA (9 juin 1930, Paris - 24 novembre 1997, Neuilly-sur-Seine)
Barbara s’est réfugiée à Saint-Marcellin pendant la Seconde Guerre mondiale avec sa famille. En 1968, elle y revient brièvement ; ce passage lui inspire la chanson "Mon enfance".
"J'ai eu tort, je suis revenue dans cette ville loin perdue ou j'avais passé mon enfance.
J'ai eu tort, j'ai voulu revoir le coteau ou glissaient le soir bleus et gris ombres de silence.
Et je retrouvais comme avant, longtemps après, le coteau, l'arbre se dressant, comme au passé.
J'ai marché les tempes brûlantes, croyant étouffer sous mes pas.
Les voies du passé qui nous hantent et reviennent sonner le glas.
Et je me suis couchée sous l'arbre et c'étaient les mêmes odeurs.
Et j'ai laissé couler mes pleurs, mes pleurs."
SAINT-PIERRE-DE-CHARTREUSE
Honoré de Balzac (20 mai 1799 à Tours - 18 août 1850 à Paris)
Écrivain français, romancier, dramaturge, critique littéraire, critique d'art, essayiste, journaliste et imprimeur, il a laissé l'une des plus imposantes œuvres romanesques de la littérature française, avec plus de quatre-vingt-dix romans et nouvelles parus de 1829 à 1855, réunis sous le titre de La Comédie humaine.
En 1833, Balzac publie "Le médecin de campagne". Dans cet ouvrage, il décrit la vie d’un médecin dans un canton de Chartreuse. Il se serait inspiré d’un médecin de Voreppe le Docteur Rome pour l’un de ses personnages. Il y dresse un véritable tableau des paysages et des habitants de la région.
"[…] Je vins à la Grande Chartreuse à pied, en proie à de sérieuses pensées. Ce fut un jour solennel pour moi. Je ne m’attendais pas au majestueux spectacle offert par cette route, où je ne sais quel pouvoir surhumain se montre à chaque pas. Ces rochers suspendus, ces précipices, ces torrents qui font entendre une voix dans le silence, cette solitude bornée par de hautes montagnes et néanmoins sans borne, cet asile où de l’homme il ne parvient que sa curiosité stérile, cette sauvage horreur tempérée par les plus pittoresques créations de la nature, ces sapins millénaires et ces plantes d’un jour, tout cela rend grave. Il serait difficile de rire en traversant le désert de Saint Bruno, car là triomphent les sentiments de la mélancolie. Je vis la Grande Chartreuse, je me promenai sous les vieilles voûtes silencieuses, j’entendis sous les arcades l’eau de la source tombant goutte à goutte. J’entrai dans une cellule pour y prendre la mesure de mon néant, je respirai la paix profonde que mon prédécesseur y avait goûtée […]"
Honoré de Balzac "Le médecin de campagne" 1833.
A 2 km du monastère, le bâtiment de la Correrie abrite le musée de la Grande chartreuse dont les collections permettent de mieux comprendre le mystère de l’Ordre des Chartreux et leur mode de vie. Consultez le site du Musée de la Grande Chartreuse.
André Gide (22 novembre 1869, Paris - 19 février 195, Paris)
Il obtient le prix Nobel de littérature en 1947.
Issu d'une famille de la bourgeoisie protestante, partageant sa vie entre Paris et la Normandie, André Gide assume à partir de 1893 son homosexualité qu'il revendique pour la première fois. Il fonde La Nouvelle Revue française (NRF), dont il est le chef de file et joue un rôle important dans les lettres françaises. André Gide est venu plusieurs fois rendre visite à son ami Jean Giono dans le Trièves.
"Quand la première fois je suis parti pour voir la Chartreuse, la grande, j’ai longtemps erré, tout auprès, sur la route de Saint-Laurent à Saint-Pierre ; je regardais sans cesse le repli de la vallée où je la savais enfoncée, invisible, et le chemin pour y mener, mais je ne m’en suis pas approché, par crainte de déflorer peut-être un rêve si longtemps choyé" André Gide “Les Cahiers d’André Walter” 1891.
SASSENAGE
Jean PREVOST - (13 juin 1901, Saint-Pierre-lès-Nemours - 1er août 1944, Sassenage)
Écrivain et journaliste français, il s’engage dans la Résistance en 1941. Son ami Pierre Dalloz, l’associe au « plan Montagnard » pour organiser militairement le maquis du Vercors. Sous sa nouvelle identité de « capitaine Goderville » il dirige un commando d’une centaine d’hommes, notamment lors des combats de Saint-Nizier du 13 juin 1944. Il avait alors emmené avec lui sa machine à écrire et rédigeait un ouvrage sur Baudelaire. Il obtient le grand prix de littérature par l’académie française en 1943 pour l’ensemble de son œuvre.
Il est fusillé par les Allemands au Pont Charvet à la sortie des gorges d’Engins le 1er août 1944 avec quatre autres de ses camarades.
"Un beau jour... Mais sait-il ce que c'est un beau jour ? Jamais il n'a pu jouir d'une heure de sa vie, sauf quand il apprenait, malade, la douceur d'être choyé et la fraicheur d'une main d'une femme. Mais c'est elle, depuis, qui l'empêche de vivre, de se faire prêtre, d'accepter son sort ; c'est elle qui lui a trop promis (...) Antonin rage quand il se rappelle ce rire léger, si tendre autrefois : elle rit maintenant pour se moquer de lui, sans doute..."
Jean PRÉVOST "L’affaire Berthet". Paru dans le quotidien Paris-soir en janvier et février 1942, ce feuilleton retrace l'affaire criminelle dont se serait inspiré Stendhal pour Le rouge et le noir, paru en 1830.
SEYSSINET-PARISET
Jean-Jacques ROUSSEAU (28 juin 1712, Genève - 2 juillet 1778, Ermenonville)
Écrivain, Philosophe et musicien genevois, Jean-Jacques Rousseau a vécu quelques semaines à Grenoble et en Isère durant l’été 1768. Célèbre mais décrié pour ses idées, il avait alors décidé de s’éloigner de Genève.
Il a séjourné au Château de Beauregard à Seyssinet-Pariset et affectionnait particulièrement les paysages qui s’étendaient au pied des falaises du Vouillant, entre Seyssinet-Pariset et Fontaine. Il s’y rendit régulièrement, notamment, pour cueillir des plantes.
Aujourd’hui cette zone de promenade a été aménagée et se nomme le désert de Jean-Jacques Rousseau.
"Le plaisir d’aller dans un désert chercher de nouvelles plantes couvre celui d’échapper à mes persécuteurs et, parvenu dans des lieux où je ne vois nulles traces d’hommes, je respire plus à mon aise comme dans un asile où leur haine ne me poursuit plus."
Les Rêveries du promeneur solitaire, 1782 Jean-Jacques Rousseau.
LA TOUR-DU-PIN
Arthur YOUNG (11 septembre 1741, Londres - 12 avril 1820, Londres)
Après avoir traversé la France à cheval (trois séjours réalisés entre 1787 et 1790), l’agronome britannique dresse dans son livre "Voyages en France" un portrait précis du royaume à la veille de la Révolution.
"Le 26. Je dînai à la Tour-du-Pin et dormais à la Verpilière. C’est l’entrée la plus avantageuse de France par rapport à la beauté du pays (…) Elle est superbe et bien plantée, a beaucoup d’enclos, et des mûriers avec des vignes. Il n’y a presque aucun vilain trait dans le paysage (…)."
Extrait de "Voyages en France", tome second, 1793.
VIENNE
Alexandre DUMAS (24 juillet 1802, Villers-Coteret – 5 décembre 1870, Dieppe)
Écrivain français. A 15 ans, il est employé comme clerc de notaire et développe une passion pour la littérature et la poésie. En, 1822 il part à Paris où il découvre le théâtre, notamment grâce à la Comédie-Française. Il mène une vie pleine de rebondissements jalonnée de duels et d’histoires amoureuses. Il s’engage politiquement lors de la révolution de 1830. Puis il entreprend de nombreux voyages, tantôt pour le plaisir, tantôt pour fuir le régime politique ou ses créanciers.
En 1829, Dumas écrit son premier drame romantique : "Henri III et sa cour" qui est une réussite. Romancier de talent et signe des récits de voyage, mais aussi les "Trois mousquetaires", la "Reine Margot" et "Le Comte de Montecristo".
En 1834 il écrit un récit de voyage "Midi de la France : impressions de voyage". Son périple le conduit dans plusieurs villes du Dauphiné notamment Vienne.
"[…] En gravissant la montagne au haut de laquelle s’élèvent les ruines du vieux château de Labatie, nous découvrîmes, par une échancrure de ses murailles, une grande partie de la ville bâtie aux deux côtés de la Gère, torrent vert et écumeux qui serpente entre ses maisons, au milieu des toits desquelles, comme Léviathan au-dessus des flots de la mer, nage pesamment la cathédrale Saint-Maurice, puis unissant comme par un ruban Vienne à Sainte-Colombe, la fille et la mère, le pont de fil de fer, si léger qu’il semble une corde tendue d’un bord du fleuve à l’autre […]"
Alexandre Dumas "Midi de la France" 1834.
VIF
Jean-François CHAMPOLLION (23 décembre 1790, Figeac - 4 mars 1832, Paris)
Égyptologue français, il est le premier à déchiffrer les hiéroglyphes, Champollion est considéré comme le père de l'égyptologie.
En 1801 Jean-François quitte Figeac pour rejoindre son frère Jacques-Joseph installé à Grenoble et intellectuel de renom. C’est là que ce dernier prend en charge l’éducation de son petit frère. Leur relation très forte va permettre à Jean-François de s’épanouir et de persévérer dans ses illustres recherches.
"Je comptais beaucoup travailler à Vif, mais le repos et le calme des champs ont détendu tous mes ressorts. " 31 mai 1824. J.Fr. Champollion à J.-J. Champollion.
"Je suis toujours, au fond, un Dauphinois endiablé !" J.Fr. Champollion depuis l’Égypte à son ami M. Augustin Thévenet, janvier 1829.
"Avant de quitter Philae, j’allai, avec MM. Duchesne, L’hôte, Lehoux et Bertin, faire une partie de plaisir à la cataracte, où nous emportâmes un bon gigot et une salade que nous mangeâmes assis à l’ombre d’un santh (mimosa fort épineux), le seul arbre du lieu, en face des brisants du Nil, dont le bruissement me rappela nos torrents des Alpes." Février 1829, J.Fr. Champollion à J.-J. Champollion.
La maison familiale, située à Vif, abrite aujourd’hui le Musée Champollion, qui fait parti du réseau des 11 musées départementaux. Il présente la vie et l’œuvre de Jean-François et de son frère aîné Jacques-Joseph. Au sein de la maison, les espaces reconstitués, les objets personnels et notes de travail plongent le visiteur dans l’effervescence intellectuelle du début du 19e siècle et la naissance de l’égyptologie.
Ce lieu fait partie de la Fédération nationale des maisons d’écrivains.
VILLARD-DE-LANS
Georges PEREC (7 mars1936, Paris – 3 mars 1982, Ivry-sur-Seine)
Alors qu’il n’avait que 5 ans, il fut envoyé par sa mère, veuve de guerre, se mettre à l’abri dans de la famille à Villard-de-Lans. Il ne reverra jamais sa mère déportée à Auschwitz en 1943.
Son premier roman "Les choses, une histoire des années soixante", publié en 1965 a reçu le Prix Renaudot. La consécration vient en 1978 avec le Prix Médicis qui vient couronner "La vie mode d’emploi". En 1975, dans le récit autobiographique "W ou le souvenir d’enfance", il revient sur son séjour dans le Vercors.
"Il y avait des saisons. On faisait du ski ou les foins. Il n'y avait ni commencement, ni fin. Il n'y avait plus de passé, et pendant très longtemps il n'y eut pas non plus d'avenir : simplement, ça durait. On était là."
VOREPPE
Pierre PÉJU ( né le 23 août 1946 à Lyon)
Romancier, essayiste et professeur de philosophie et de français.
Issu d'une famille de libraires d'origine lyonnaise, il étudie la philosophie à la Sorbonne qu’il enseigne plus tard au lycée international Stendhal, à Grenoble, pendant quatorze ans. Pierre Péju, installé à Voreppe est l’auteur d’un certain nombre d’ouvrages comme "Naissances", "La vie courante", "Le rire de l’ogre". Il obtient le prix du livre inter pour son roman "La petite Chartreuse", paru en 2002, qui a pour décors le massif de la Chartreuse et qui sera adapté au cinéma en 2005.
"Mon nouveau territoire (Pays voironnais) s’élargissant en cercle concentriques m’apparut bien vite comme un palimpseste fascinant, les textes partout lisibles des époques de l’histoire, des souvenirs littéraires, de l’art et de l’architecture se superposant et se mêlant de façon très dense[…] Quelle émotion que d’apprendre […] que c’était au château, caché au centre de Voreppe et propriété actuelle de la famille Sieyès, que Laclos avait fréquenté les jeunes filles devenues des modèles pour "Les liaisons dangereuses".
[…] Le plus impressionnant pour moi fut tout de suite la présence de la Chartreuse. Cette alliance étonnante entre la sensualité des éléments, les déchirures de la roche qui au détour d’un chemin, évoquent la gravure romantique, et cette spiritualité ou ce génie du lieu immédiatement perceptible qui expliquent que très tôt les hommes désirant l’ascèse et la solitude s’y fussent retirés."
Pierre Péju - Préface "Pays d’art et d’histoire du pays voironnais" 2012.