"Sources qui cristallisent" Sébastien Schnyder

Le projet d’exposition interrogerait le lien entre l’eau, la minéralité et la ville, en explorant leur interaction à travers des formes qui questionnent notre rapport aux espaces vécus. Il s’agit de revisiter les fonctions de la ville moderne, héritée de l’hygiénisme, où l’eau a été asséchée et sa circulation accélérée par des réseaux artificiels, excluant progressivement les cours d’eau et l’eau de pluie du paysage urbain, perçus comme des menaces sanitaires et des risques d’inondation. Pourtant, ces lieux, autrefois essentiels à la vie collective – bains publics, lavoirs, espaces de rassemblement – sont aujourd’hui menacés ou disparus. Que reste-t-il de ces formes ? Comment façonnent-elles encore notre mémoire et notre perception de l’espace urbain ?
L’exposition revisiterait ces questionnements à travers plusieurs oeuvres : Aria (2024), une série de deux formes inspirées d’éléments de design des toilettes publiques, réinterprétant ces infrastructures du quotidien ; Les Corps Creux (2022), qui associe l’empreinte de la roche aux parois aseptisées du placoplâtre, évoquant à la fois la ruine et la mémoire des surfaces construites ; Les Traboules (2023), une série renvoyant aux empreintes laissées par les espaces de mémoire et à la structure minérale de nos bâtiments ; et Au commencement était la fin (2025), un film documentaire accompagné d’une installation sonore immersive avec quatre enceintes de monitoring disposées en carré diffusant la bande son de la vidéo mélangée à un bruit de vrombissement sourd enregistré à l’intérieur de la montagne, des sièges au centre et un écran en fond de salle, occupant sans doute toute la partie après l’escalier.
L’installation centrale, encore sans titre, viendrait fédérer l’ensemble en mettant en relation l’eau et la minéralité. Réalisée en céramique, résine et métal, elle s’inspirera des infrastructures d’eau historiques – bains publics, lavoirs – et réinterprétera ces lieux de sociabilité aujourd’hui en déclin. Une structure-fontaine en deux parties se dessine, constituée de bassins en résine acrylique (le même matériau que Les Corps Creux), peints et texturés pour accentuer l’aspect minéral. Certaines parties, réalisées à partir de moules, seront tirées en plusieurs exemplaires et intégrées aux parois de l’espace d’exposition. Les deux bassins seraient reliés par un conduit en inox, au centre duquel se trouveraient deux formes en céramique, hybrides entre gargouilles, becs de fontaine – largement inspirés du village de Delémont, en Suisse, où vivent mes parents – et éléments rocheux. Comme vous le verrez sur les modélisations, qui ne sont fournies qu’à titre d’exemple, les couleurs, matières et formes sont encore à l’état de maquettes. Je les ai numérotées par groupes afin que nous puissions en discuter ensemble et déterminer celles qui semblent les plus intéressantes pour cette exposition. Je pense que les formes accrochées pourraient être installées sur des cimaises, mais cela peux aussi être un accrochage plus minimaliste, avec les sculptures dans les voutes, et l’installation sculpturale placée au centre avant et la vidéo projetée au fond, un parti pris qui pourrait être intéressant, à discuter.
Ce projet interrogerait ainsi nos rapports aux formes urbaines en mutation, aux ruines modernes et aux espaces en transition. Il nous invite à repenser notre relation à l’eau dans la ville et à ces architectures délaissées, témoins silencieux de notre histoire collective.